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Données sur les médicaments : points de repère et pistes d’action

Rapport d’analyse de Croix Bleue Medavie

Par Chris Goguen, chef de service, Gestion stratégique des médicaments, Croix Bleue Medavie

Données sur les médicaments : points de repère et pistes d’action

Rapport d’analyse de Croix Bleue Medavie

Par Chris Goguen, chef de service, Gestion stratégique des médicaments, Croix Bleue Medavie

Note de la rédaction :

Chris Goguen, chef de service, Gestion stratégique des médicaments à Croix Bleue Medavie, s’est penché sur les catégories de médicaments qui entraînent des répercussions sur les régimes afin de dégager des tendances et d’en tirer des observations importantes pour les différents intervenants.
Ne manquez pas de lire cette analyse de données et les points de repère concrets proposés. Nous invitons les conseillers à communiquer les principales conclusions et recommandations de Chris avec leurs clients pour favoriser une gestion optimale des régimes. Nous encourageons également les conseillers et leurs clients à consulter cet article de Benefits Canada dans lequel Chris explique comment il est possible de tirer profit de l’analyse de données et des conclusions qui en découlent pour prendre des décisions stratégiques et judicieuses concernant leurs offres de produits.

Principales conclusions

D’après l’analyse des demandes de règlement liées aux médicaments effectuée sur un échantillon d’un million d’assurés, la tendance relative aux dépenses en médicaments pour 2018 (c.-à-d. l’augmentation du coût des médicaments par adhérent) se résume à deux facteurs opposés :

  1. La réduction des dépenses en médicaments « traditionnels » (-2,3 %) découlant de la disponibilité et de l’utilisation accrues des médicaments génériques offerts à des prix plus bas.
  2. La croissance des dépenses en médicaments « spécialisés » (+7,3 %) provoquée par une hausse de près de deux chiffres (+9,9 %) de l’utilisation de ces médicaments.

L’examen approfondi des demandes de règlement et des schémas observés chez les demandeurs à l’origine de ces tendances contraires en matière de coûts, réalisé sous l’angle des maladies, des médicaments en développement et des tendances en matière de politiques, apporte toutefois un meilleur éclairage sur l’état de santé actuel et futur des régimes d’assurance médicaments et des adhérents.



La croissance des dépenses en médicaments « spécialisés »

+7.3%



Médicaments traditionnels

Diabète

Dissimulés dans la réduction du coût global des médicaments « traditionnels » en 2018, les antidiabétiques (médicaments pour la maîtrise de la glycémie) ont constitué le principal moteur de la croissance des dépenses totales en médicaments, affichant une hausse de près de 9 %. Contrairement à ce que l’on observe dans beaucoup d’autres catégories thérapeutiques, la hausse des dépenses liées aux antidiabétiques est attribuable à l’effet double de l’augmentation de l’utilisation et de l’inflation. Cette tendance a fait grimper les dépenses liées aux antidiabétiques à plus de 8 % du coût total des médicaments, avec un passage du troisième au deuxième rang dans le classement des dépenses totales en médicaments. Un assuré sur 15 a fait une demande de règlement pour des antidiabétiques, une hausse de plus de 50 % au cours des 10 dernières années.

S’il est vrai que les progrès de la médecine élargissent le nombre d’options thérapeutiques qui permettent aux patients de maintenir une bonne maîtrise de leur glycémie, l’utilisation combinée de traitements pour prévenir ou ralentir la perte progressive du contrôle glycémique rend la gestion du diabète plus complexe et plus coûteuse. Près de 60 % des demandeurs prennent deux antidiabétiques ou plus en même temps, et près d’un tiers en prennent trois ou plus. En outre, comme les patients atteints de diabète sont souvent traités pour d’autres problèmes de santé et facteurs de risque, le coût annuel moyen des demandes de règlement pour les personnes atteintes de diabète est presque trois fois plus élevé que pour les autres demandeurs (2 650 $ par rapport à 904 $). Qui plus est, la complexité des soins du diabète est exacerbée par les affections concomitantes, et la nature souvent silencieuse de la maladie peut se traduire par une prise en charge sous-optimale, notamment une baisse de l’adhésion au traitement au fil du temps.




Un assuré sur 15 a fait une demande de règlement pour des antidiabétiques,
une hausse de plus de 50 % au cours des 10 dernières années.

Piste d’action :

Les conséquences du diabète sur l’économie et la santé ne peuvent être ignorées. Les stratégies visant à sensibiliser les adhérents à la prévention du diabète, à accroître leur engagement et à éliminer les obstacles à l’accès aux ressources d’autogestion, comme l’accompagnement en matière de santé, sont essentielles pour assurer la viabilité du rendement de l’investissement dans les régimes de soins de santé.

Santé mentale

Grâce à l’utilisation des médicaments génériques et à la réduction des prix qui en a découlé, les dépenses liées aux antidépresseurs ont diminué de plus de 3 % en 2018. Cette tendance ne doit toutefois pas être attribuée à un assouplissement des exigences relatives aux traitements en santé mentale. En fait, le recours aux antidépresseurs a augmenté de plus de 6 % au cours de la même période, ce qui place ces médicaments au deuxième rang des 10 principales catégories thérapeutiques dont l’utilisation est en hausse. Un assuré sur huit a fait une demande de règlement pour des antidépresseurs, pour la première fois dans un tiers des cas, et les demandeurs ont essayé deux médicaments différents en moyenne.

Il ressort clairement des données sur les médicaments que de plus en plus de personnes cherchent à obtenir des soins pharmaceutiques pour traiter leur détresse psychologique et leurs troubles mentaux. Parallèlement à cela, moins d’un adhérant sur dix ayant demandé un remboursement pour des antidépresseurs a également présenté des demandes de règlement pour des consultations en santé mentale. Tendance encore plus surprenante, on observe chez les adultes une augmentation de l’utilisation des médicaments destinés au traitement des troubles déficitaires de l’attention avec hyperactivité (TDAH). Pour la toute première fois, la classe des médicaments pour le TDAH figurait sur la liste des 10 principales catégories thérapeutiques en matière de dépenses, affichant la tendance d’utilisation globale la plus élevée, soit 7,9 %. La population de demandeurs qui a connu la croissance la plus rapide était celle des adultes de 30 à 49 ans, avec une croissance de 20 %. Plus de 40 % d’entre eux en étaient à leur première demande de règlement pour des médicaments contre le TDAH.



Un assuré sur huit a fait une demande de règlement pour des antidépresseurs, pour la première fois dans un tiers des cas, et les demandeurs ont essayé deux médicaments différents en moyenne.

Piste d’action :

La santé mentale est peut-être le plus grand défi auquel doivent faire face les entreprises aujourd’hui. Tous les volets des régimes de soins de santé (médicaments, garanties de SSC, PAE, options numériques) peuvent et doivent être pleinement intégrés et mis à profit grâce à des services, à des outils technologiques et à des analyses améliorés, afin d’avoir des répercussions plus profondes sur la santé, la productivité et la résilience.

Médicaments spécialisés

Les médicaments spécialisés, soit ceux qui coûtent 10 000 $ ou plus par personne par année, représentaient une proportion encore
plus grande du coût total des médicaments en 2018, atteignant 31 % des dépenses totales, même s’ils étaient encore associés à moins de 2 %
des adhérents qui soumettent des demandes de règlement liées aux médicaments.

Médicaments biologiques

En 2018, les médicaments biologiques ont continué de se classer au premier rang pour ce qui est de la contribution globale aux dépenses en médicaments, avec un pourcentage de 18 % (en légère hausse par rapport à 17,5 % l’année antérieure). Cependant, le taux de croissance des dépenses en médicaments biologiques (3,8 %) a été nettement inférieur à celui des autres catégories de médicaments spécialisés, dont les anticancéreux. Malgré une utilisation accrue (un utilisateur de médicaments biologiques sur cinq en était à sa première demande en 2018), la croissance des dépenses globales en médicaments biologiques a connu un ralentissement en 2018, en raison des mesures de contrôle appliquées dans le cadre de la gestion des régimes et du passage accéléré à des options à coût moins élevé chez les patients.

Étant donné que 80 % des demandeurs prenaient déjà un médicament biologique au début de 2018, la dynamique d’utilisation concernait surtout les patients existants qui sont passés de médicaments comme Remicade, Enbrel et Humira à des médicaments plus récents ayant un mode d’action différent, dont Stelara, Cosentyx, Entyvio et Xeljanz. En ce qui concerne les médicaments en cours de développement, de nouveaux traitements biologiques ciblés pour les maladies rhumatoïdes (p. ex., arthrite psoriasique) et les maladies inflammatoires de l’intestin (maladie de Crohn et colite ulcéreuse), qui font appel à des modes d’action différents (inhibiteurs de JAK, inhibiteurs d’ILK, traitements à base de cellules souches), vont continuer de venir remplacer les traitements biologiques anti-TNF de première génération comme Remicade, Enbrel et Humira. D’ici 2020, on trouvera sur le marché plus de deux douzaines de médicaments biologiques reposant sur sept modes d’action différents.

Un examen plus attentif de la population d’adhérents qui se font rembourser des produits biologiques apporte un nouvel éclairage sur les maladies chroniques qui ont des répercussions sur la santé et la productivité de la main-d’œuvre. Pas moins de 40 % des adhérents qui présentent des demandes de règlement visant des médicaments biologiques ont déclaré avoir reçu un diagnostic de maladie de Crohn ou de colite, ce qui représente de loin la prévalence la plus élevée dans l’ensemble de la population traitée par un produit biologique. Ce chiffre n’est guère étonnant lorsqu’on sait que selon une étude parue récemment dans l’American Journal of Gastroenterology, ces maladies inflammatoires de l’intestin sont plus fréquentes au Canada que partout ailleurs dans le monde (1 Canadien sur 150 est touché), la Nouvelle-Écosse arrivant en tête du classement national.




Pas moins de 40 % des adhérents qui présentent des demandes de règlement visant des médicaments biologiques ont déclaré avoir reçu un diagnostic de maladie de Crohn ou de colite, ce qui représente de loin la prévalence la plus élevée dans l’ensemble de la population traitée par un produit biologique.

Piste d’action :

L’augmentation sans précédent du nombre de nouveaux médicaments biologiques (injectables et oraux) contre les maladies rhumatoïdes et les maladies inflammatoires de l’intestin permettra aux adhérents qui prennent déjà des médicaments biologiques de mieux maîtriser leur maladie. Pour éviter les conséquences non désirées, les stratégies de gestion des régimes devraient allier contrôle des coûts, surveillance du traitement et gestion proactive des cas afin de permettre aux adhérents de passer au traitement optimal pour maîtriser leur maladie. Une attention particulière devrait être accordée au rapport coût-avantages de la prise en charge de la maladie de Crohn et de la colite ulcéreuse.

Traitement du cancer

Les médicaments anticancéreux ont connu la plus forte croissance dans la catégorie des médicaments spécialisés en 2018, avec une hausse des dépenses de près de 14 %. Maintenant responsables de plus de 5 % des dépenses totales en médicaments (passage du sixième au cinquième rang au classement général), les traitements anticancéreux ont constitué la troisième source de croissance des dépenses globales en médicaments en 2018. Les nouveaux anticancéreux oraux, qui ciblent des mutations génétiques spécifiques et les cancers qui y sont associés, souvent impossibles à traiter auparavant, révolutionnent le paysage thérapeutique. Le passage d’un traitement en milieu hospitalier à un traitement en milieu communautaire, rendu possible par l’arrivée de nouveaux médicaments oraux ciblant les cancers qui touchent des populations plus jeunes en âge de travailler, modifie rapidement le rôle des régimes privés dans le continuum des soins liés au cancer, particulièrement dans l’Est du Canada.

Un examen plus approfondi de la population des adhérents qui soumettent des demandes de règlement pour des anticancéreux met en lumière les principaux diagnostics qui touchent les employés et leur famille. En 2018, plus de 2 % des demandes de règlement visant des anticancéreux portaient sur des traitements de soutien. Le cancer du sein était associé à la prévalence de traitement la plus élevée, et de loin, ce type de cancer étant présent chez 50 % des adhérents qui ont demandé un remboursement pour des médicaments anticancéreux, suivi du cancer de la prostate et du cancer de la peau. En 2018, un tiers des femmes ayant présenté une demande de règlement pour un traitement visant le cancer du sein en étaient à leur premier traitement, comparativement à 50 % des demandeurs atteints d’un cancer de la prostate et à 80 % de ceux atteints d’un cancer de la peau. Pour ce qui est des coûts, le traitement du cancer du sein a constitué le facteur le plus important dans la croissance globale des dépenses en médicaments anticancéreux, suivi des nouveaux médicaments pour le traitement du cancer de la peau (mélanome métastatique).



Le cancer du sein était associé à la prévalence de traitement la plus élevée, et de loin, ce type de cancer étant présent chez 50 % des adhérents qui ont demandé un remboursement pour des médicaments anticancéreux, suivi du cancer de la prostate et du cancer de la peau.

Piste d’action :

Les traitements contre le cancer ont fait leur entrée en milieu de travail. L’établissement de modèles de gestion de cas permettant une plus grande collaboration entre les régimes de soins de santé, le système de soins de santé en oncologie et les programmes de soutien aux patients sera essentiel pour mieux gérer les coûts, la complexité et la coordination des soins liés au cancer.

Plus des deux tiers des nouveaux médicaments examinés par le Comité consultatif sur les médicaments de Medavie sont des médicaments spécialisés, et au-delà de la moitié d’entre eux sont destinés au traitement du cancer. Si l’on tient compte des médicaments en cours de développement, il est à prévoir que cette tendance se poursuivra, devant la multiplication des médicaments anticancéreux oraux ciblant des mutations génétiques spécifiques qui sont appelés à être approuvés (seuls ou en association) pour le traitement de divers types de cancer.

Outre les progrès réalisés dans le traitement du cancer, plusieurs nouveaux médicaments contribueront au retour à une croissance à deux chiffres des dépenses en médicaments spécialisés dans les régimes privés, y compris de nouveaux traitements biologiques ciblés à coût élevé visant des problèmes de santé courants, dont la migraine, la dermatite et l’asthme, traditionnellement traités par des médicaments moins coûteux, et des médicaments très onéreux utilisés pour traiter des maladies rares, dont l’utilisation ira en grandissant.

Piste d’action :

Les médicaments spécialisés ciblés à coût élevé continueront d’entraîner de nouvelles dépenses pour les régimes, en lien avec le traitement de troubles de santé courants et plus rares. Il faut s’attendre à ce que les stratégies novatrices de gestion des listes de médicaments comprennent des programmes de suivi du rendement des médicaments et de partage des risques afin d’assurer la valeur des régimes pour les bons patients, au bon moment.